Cédric O, secrétaire d’État chargé de la Transition numérique, audition par la mission sénatoriale d’information « Lutte contre l’illectronisme et inclusion numérique », 9 septembre 2020

Fracture numérique : « Le manque de formateurs est le point de blocage majeur » (Cédric O)

À l'approche de la remise de son rapport, le 17 septembre prochain, la mission sénatoriale d'information « Lutte contre l'illectronisme et inclusion numérique » auditionnait mercredi 9 Cédric O. Pour le secrétaire d'État chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques, l'urgence est à la formation.

Par - Le 15 septembre 2020.

Les difficultés d'accès au numérique sont de trois ordres, rappelle Jean-Marie Mizzon, (Union centriste, sénateur de la Moselle) en début d'audition : « Ceux qui n'ont pas le réseau, ceux qui n'ont pas l'outillage, ceux qui n'ont pas le mode d'emploi. » Pour Cédric O, secrétaire d'État chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques, les deux premiers volets sont certes des « sujets », mais en voie d'être résolus ou secondaires : alors que l'ensemble du territoire devrait bénéficier de la fibre à l'horizon 2025, la question de l'équipement est renvoyée au « dernier maillon de la chaîne ». Estimant que les politiques d'équipement systématique des collégiens et lycéens en tablettes ont « quasiment toujours été un grand échec », il appelle à accompagner toute fourniture de matériel d'un « apprentissage des usages et d'une utilisation par le professeur ».

Former plus et mieux

Concernant ceux qui n'ont pas le mode d'emploi, Cédric O appelle à répondre par un renforcement massif de l'accompagnement et de la formation. Il le rappelle, c'est une enveloppe de 250 millions d'euros sur deux ans qui a été annoncée le 3 septembre lors de la présentation du plan de relance. Avec cette somme, qui multiplie quasiment par dix le budget jusqu'ici alloué à l'inclusion numérique, le gouvernement entend lever l'un des principaux obstacles à l'acculturation des citoyens : « Le manque de formateurs et le manque de structuration et de professionnalisation de la filière formation nous est apparu comme étant le point de blocage majeur pour accélérer la formation des Français », a-t-il martelé. Insistant sur la nécessaire qualité de l'offre de services à déployer, il souligne que l'acte de formation est un métier : « Former et autonomiser n'est ni le travail d'un service civique, ni celui d'un travailleur social, sauf s'il a été formé. » Reste qu'en l'absence d'un vivier de professionnels à la hauteur des enjeux, Cédric O appelle à « prendre le temps, avec les collectivités territoriales, de dessiner ce que seraient ces emplois ».

Pass Numérique

Interpellé par Raymond Vall, rapporteur de la mission, sur la lenteur du déploiement du Pass Numérique, le secrétaire d'État a tour à tour rappelé l'impact de la crise du Covid-19 et renvoyé la responsabilité sur les collectivités territoriales. Et d'expliquer qu' « à ce stade, les 250 millions d'euros ne sont pas destinés au Pass, ne serait-ce que parce que les 25 premiers millions alloués par l'État n'ont pas été dépensés ni même parfois engagés ». La porte demeure cependant ouverte et il n'exclut pas un financement de postes à 100 %, sous réserve que les collectivités se dotent d'une véritable stratégie d'inclusion numérique. Si celle-ci existe dans certains départements (Hauts-de-France, Savoie, Creuse, Pyrénées-Atlantiques, …), « d'autres territoires n'ont pas même engagé une réflexion », a-t-il estimé.

Moderniser sans exclure

Au cours de son audition, le secrétaire d'État a aussi établi un distinguo parmi les quelque 13 millions de Français en difficulté avec le numérique : d'un côté, « les 6 à 7 millions que l'on peut former », de l'autre, « les 6 à 7 millions qui ne seront jamais autonomes ». Pour ces derniers, Cédric O reconnaît que le gouvernement est allé « trop vite dans la numérisation des services publics ». Et face à l'engagement du président de la République d'atteindre les 100 % de démarches dématérialisées d'ici fin 2022, il assure que « le plus urgent n'est [désormais] pas le 100 % mais la qualité des 70 % actuels ».